[EXTRAIT – BORDEAUX est AVENIR]
2007. Un dimanche d’hiver. Dans leur maison. Le directeur de cabinet d’Alain Juppé m’a téléphoné. Nous sommes invités avec mon mari, David, à un déjeuner chez le maire. Il n’a pas pensé un seul instant que nous refuserions, ni même que nous hésiterions : il avait raison. Sur la route ce jour-là, David devine que ce sera un déjeuner de travail. Selon lui, il n’y a aucune autre raison objective de nous convier. Il aura toujours été d’une grande lucidité. Nous sommes en décembre : nous découvrons deux autres couples, et pour chacun un futur colistier comme moi. Je le comprends durant l’apéritif.
Gilles B est là, circonspect. A côté de lui se tient un publicitaire que je connais depuis la période tramway. Nous rentrons assez vite dans le vif du sujet après quelques échanges classiques dans ce type de déjeuner. Je mesure la chance d’être ici, je la surestime à cette époque-là, du moins ai-je cru vivre un moment très important. Ce le fut, mais sur le plan strictement professionnel. A ce stade, je suis encore totalement dans l’affect. Les deux autres couples connaissent nos invitants depuis longtemps.
Cette idée de déjeuner, c’est celle d’Isabelle : nous incarnons le sang neuf de la liste de 2008 et le regard nouveau, celui qui ne connaît rien de l’équipe municipale en place, ou si peu. Alain Juppé rentre dès l’apéritif dans le concret : il nous lit ses trente propositions programmatiques et nous demande notre avis. Longtemps, j’ai vécu ce type d’exercice avec angoisse : donner son avis au débotté sans avoir été prévenue, sans avoir mûri le sujet et précisément avoir été choisie pour cela, pour réagir comme le ferait un lambda. C’est difficile de l’admettre. C’est pourtant aussi une chance inouïe que de saisir ces moments rares pour dire plus que ce qu’on vous demande en évoquant ce que vous avez, vous, en tête, ce que vous souhaiteriez que votre grand élu porte. Le reste du déjeuner sera totalement consacré à la campagne : la baseline, l’affiche, le format du programme, tout y passera. Je comprends alors que je serai sûrement en position éligible, je comprends que pour le reste il faudra apprendre sur le tas et démontrer sa valeur in situ, qu’elle sera jugée en fonction de celle des autres. Gilles B. nous a observés : je crois même avoir vu dans ses yeux qu’il s’était marré !
Au moment du départ, Alain Juppé, me remerciant de notre présence, me dit que la campagne va bientôt démarrer, qu’il va falloir travailler sans relâche de janvier à mars. C’est sa dix-huitième campagne, c’est ma première. Il sait de quoi il parle ; moi pas encore.
Après les fêtes, on nous a demandé une photo, quelques phrases pour nous qualifier : âge, profession, et quelques autres éléments… comme pour une inscription à l’école. Un matin, on nous a fait monter sur scène, à ciel ouvert, devant les journalistes.
… La suite mercredi prochain
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