Confiance et transparence

Lorsque je décline ma fonction, lors de rencontres informelles au cours desquelles la parole est libre, je suis souvent prise à partie : « Vous les élus, vous ne vous rendez pas compte », ou « Vous ne pouvez pas faire grand-chose de toute façon », ou encore et pire ! « Ce qui vous intéresse ce sont vos avantages… ». Les analyses sont plus ou moins poussées, le ton est plus ou moins agressif mais l’intention et la crise de confiance sur laquelle elle repose sont identiques.

L’image des élus s’est considérablement dégradée. Nos actions, nos propos, nos trajectoires de vie font l’objet de polémiques de plus en plus sévères, d’interprétations de plus en plus désastreuses. Le comble est que, ce que fait ou ne fait pas l’un de nous, rejaillit sur tous les autres nettement plus profondément que pour n’importe quelle autre activité. Les citoyens n’ont plus peur de bousculer leurs élus : la colère abîme tout sur son passage. Par delà la personnalité de tel ou tel, c’est la fonction même d’élu, les conditions de mise en œuvre de la démocratie représentative et donc de la protection de l’intérêt général, qui sont questionnées. Or, l’élu est par essence normalement et précisément choisi pour représenter un collectif, choisi par la majorité de tous les électeurs, qu’ils aient voté ou non, du moins en avaient-ils la possibilité, pour défendre l’intérêt général et porter une vision. Les élus sont des citoyens choisis par ces derniers pour les protéger. Si l’on pousse la logique, ne plus avoir confiance en ses élus revient à ne plus avoir confiance en soi. Je vous provoque un peu !

Légalement, un élu est légitime dès que la liste dans laquelle il figure est arrivée en tête à l’élection. Mais le nombre de votants est limité par rapport au nombre d’habitants (abstentionnistes, non-inscrits, étrangers) et le pourcentage obtenu par le « gagnant » est souvent relativement faible. L’addition des deux constats pouvant même le rendre dérisoire quantitativement. Les jours de vote sont pourtant ceux qui font se déplacer le plus de citoyens. Le reste du temps la participation à la vie démocratique est incroyablement faible (en proportion du nombre total d’habitants). L’offre politique est considérée comme insuffisamment représentative : des identités plurielles du peuple, de ses visions du collectif et de l’avenir.

La faiblesse de cette offre politique et les moyens de la corriger ne sont jamais vraiment au cœur du débat public. Les débats sur le statut de l’élu se limitent à celui du cumul : la formation, la rémunération, les conditions de sortie d’un mandat ne sont jamais discutées. Pourtant, nous savons que tous les citoyens ne peuvent pas devenir élu. Le système ne le permet pas. Les électeurs s’en plaignent mais au final le nombre de candidats à ce statut singulier diminue comme peau de chagrin. Et puis, trop de promesses au niveau national ont été faites, des sur-promesses de plus en plus énormes au fur et à mesure des campagnes. Tout a été simplifié à outrance pour pouvoir marquer les esprits plus vite et plus fort. Les citoyens ont retenu que la gauche et la droite, successivement au pouvoir, n’avaient pas tout fait de ce qu’elles avaient promis et n’avaient surtout jamais vraiment dit clairement pourquoi ça n’avait pas marché. L’accès aux données publiques et la transparence totale de l’action publique sont encore un mirage ; c’est pourtant la clé pour une compréhension réciproque et un dialogue ouvert.

L’élu local, de terrain, échappe encore un peu, par ses relations directes à la population, à ce discrédit général parce qu’il agit concrètement et que tout se voit, se vérifie en permanence. Pour autant, il subit de plus en plus le malaise démocratique. Il doit d’ailleurs tout faire pour le dissiper.

J’essaie systématiquement et presque méthodiquement, lors de ces rencontres informelles, de tordre le cou à toutes les idées préconçues et aux certitudes dangereuses. Et je termine toujours avec une incitation à participer aux débats publics, à la vie de la cité et pourquoi pas également à devenir élu. Mais j’espère toujours entendre, à l’issue des critiques, des contre propositions : elles sont vitales. Je comprends l’agacement, et même l’exaspération, pour les ressentir souvent moi aussi depuis ma place d’élue. Mais pour nous en sortir, il faut proposer de nouvelles voies, participer vraiment et en nombre, à la transformation du système.

Je veux, au travers de ce blog, partager davantage encore mon quotidien d’élue locale et échanger toujours plus et mieux avec vous. Tant mieux si cet espace interactif, comme d’autres, peut faire émerger ces contre propositions, ces nouvelles voies. J’en formule en tout cas le vœu, je vous espère !

3 réflexions sur “Confiance et transparence

  1. DUBREUIL sylvie dit :

    Merci Mme Siari pour cette ouverture à l échange . Je vous rejoins dans le fond ou on ne peut pas passer son temps a raler , il est important de réfléchir et de faire des propositions . Soyons créatifs , osons dire les choses mêmes si elles sont décalées . Osons . Partageons . Nous serons plus fort . Je suis toujours très surprise par le nombre d informations , de réactions sur les réseaux sociaux !!! Pourquoi ne sont ils pas utilisé à des fins de mouvements, de changements . Nous avons la ressource mais nous ne savons pas l utiliser !!!! A vous suivre . Cordialement

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  2. Hervé FOUCAUD dit :

    Alexandra

    Je suis entièrement en accord avec ce que tu dis et reste convaincu que, en tant que citoyen, il appartient à chacun de nous de nous engager, de la place où nous somme, pour rendre la noblesse à la démocratie.
    Nous ne pouvons passer notre temps à tout attendre des élus, quelque soit leur couleur politique, comme s’il étaient les seuls responsable du mal-être général.
    Chaque citoyen devrait pouvoir et surtout vouloir, participer au débat et être force de proposition pour les transformations qui permettront d’appréhender les problèmes majeurs qui sont entrain de métamorphoser notre civilisation.
    Pour cela nous avons besoin de transparence et que les citoyens se sentent véritablement en confiance par rapport au débat politique au sens noble du terme.
    Nous devrions pouvoir maintenant, ensemble, quelque soit notre position dans la société, préparer et enrichir de nos expériences et de notre parole libérée, le terreau d’une pépinière de projet dans lequel chaque citoyen et habitant contribua au mieux vivre ensemble.
    Ainsi, les valeurs fondatrices de notre nation reprendront, pour chacun de nous, en tant qu’acteur et non plus comme simple spectateur, le sens et la force qui permettront faire de la France, un peuple confiant dans l »avenir et pleinement impliqué dans sa construction.

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